MoonCol, une petite villégiature lunaire?


Dix ans après le cataclysme qui frappa cette bonne vieille Terre, les coursives spacieuses et propres des colonies privées de MoonCol affichent toujours leurs holovid montrant de grands dômes aux matériaux arachnéens, abritant de luxuriantes forêts, des enfants s'amusant dans l'herbe, la planète bleue occupant une partie du ciel lunaire. Quelques corpo subalternes auront oubliés de déprogrammer cette communication, qui malgré la situation enviable des communautés, est encore très loin d'être d'actualité.

Dans les années 2070, MoonCol était en guerre contre les Onze. Oui, dit comme ça, on imagine un preux chevalier en armure, affrontant une horde de sauvages. Mais en réalité, la corporation née d'un programme UN était sur le point de disparaître, de manière violente. S'appuyant essentiellement sur le charisme de son CEO, Mutton Hendleberg, la firme europane s'était affranchie de tous les carcans étatiques, et avait rapidement formée une flotte de lanceurs suborbitaux, à coups de milliards d'eurocreds, avant que ces derniers ne perdent les trois quarts de leur valeur. MoonCol, son truc, c'était l'hélium3 (et beaucoup d'optimisation fiscale également). Les premières colonies lunaires furent rapidement en place, dans les années 60, et comme tout bon génie des affaires europan qui se respecte, Hendleberg prit la grosse tête et s'appropria la Lune. Les Dragons possédaient plusieurs stations minières, ainsi qu'une petite colonie scientifique, rien de bien extraordinaire, mais suffisamment toutefois pour se sentir viser par ce remake de l'expansion colonialiste occidentale. Plusieurs OPA plus tard, les keratsu avaient saignées MoonCol à blanc, contraignant Hendleberg à larmoyer dans des émissions holovid pas trop regardées. 

Souvenez-vous, à l'époque, les nations europanes étaient infestées par des mouvements contestataires violents, d'infâmes séditieux voulant manger à leur faim et ne plus être sommairement exécutés. Par quelques tours de passe-passe, ce fut MoonCol qui obtint le juteux contrat visant à se débarrasser des encombrants. Les projets de belles stations balnéaires sur la Lune furent oubliés, et de bien moins beaux pénitenciers supermax les remplacèrent. Des importuns ayant toujours la fâcheuse tendance à recruter quelques punks pour exfiltrer de dangereux activistes, ces derniers furent transférés sur la Lune, et tant pis si quelques cargos disparurent en flammes dans l'atmosphère. Paraît-il que Mutton Hendleberg se suicida en vivant sa première émeute lunaire, ses équipes n'étant pas alors formées pour contenir une population carcérale. Quoiqu'il en soit, la corporation parvint à se maintenir dans l'ombre des gouvernements europans, oubliée de toutes et tous, ses ambitions revues à la baisse. 


Bon, comme ça, on dirait bien une sorte de happy end corporatiste, un peu glauque certes, mais nous montrant que quand on veut, on peut. Oui, sauf que MoonCol était alors sous perfusion de fonds UN, et que peut-être dans quelques décennies, la gestion des cinq prisons supermax lunaires deviendrait rentable pour la corpo. Mais la Guerre du Point final vint bouleverser les projections optimistes. Les Onze avaient depuis longtemps rachetés tous les éléments technologiques brevetés par MoonCol, et sans plus aucun lien avec son approvisionnement terrien, la corporation se vit rapidement incapable de subvenir aux besoins en eau, air, énergie, nourriture, bref, les émeutes devinrent quotidiennes, et deux stations pénitentiaires tombèrent sous la coupe de bandes de prisonniers. Pas des écologistes malmenés, non, mais plutôt le genre cyberpsychopathes bourrés d'implants. Une troisième se verrouilla, suite à une épidémie quelconque, et son réacteur se mit en veille, tuant toute forme de vie à l'intérieur. 

Le XXIIème siècle arrive, et pour les corpos de MoonCol, l'heure n'est donc pas à la fête. Dix années depuis le Point final auront permis à quelques cadres ingénieux de bricoler des solutions viables afin de transformer les deux pénitenciers encore fonctionnels en stations à peu près autonomes. Les quartiers supermax sont toujours pleins à craquer, essentiellement grâce aux nouveaux arrivants originaires des colonies orbitales, surpeuplées et ne s'encombrant pas de droits de l'Homme et autres billevesées rétrogrades. Ce sont elles également qui fournissent la technologie manquante à MoonCol, qui troque les produits de ses serres hydroponiques. Il faut bien l'avouer, même si les anciennes publicités vantant le paradis ne sont pas contractuelles, les conditions de vie pour les personnels des deux stations restent très au-dessus du niveau de vie moyen sur Terre. Évidemment, il faut être adepte des trois petits singes pour ne pas se souvenir qu'à une cloison blindée de distance, 90% de la population locale vit avec un minimum calorique quotidien, et des conditions de détention épouvantables. 
MoonCol perdure donc, pas au sommet de sa forme, mais regroupant lentement des ressources afin de s'assurer la mainmise sur la Lune et son hélium3, le bon vieux rêve de papy Hendleberg. Grâce au soutien intéressé des habitats orbitaux, à l'absence des Dragons sur le satellite, et à une force de frappe désormais conséquente, un projet de réappropriation à été initié. La CEO Yenduli Avasharala a patiemment sélectionnée les membres d'une équipe tactique, lourdement équipée, parfaitement formée, afin d'aller lui récupérer les trois stations perdues par négligence. Jouant du bâton et de la carotte, elle a également su s'attirer les services de plusieurs groupes de détenus, se voyant octroyés quelques privilèges en échange de basses besognes. L'esclavage corporatiste, un classique. Les habitants des stations MoonCol ont depuis longtemps prit l'habitude de découper leurs habitats en trois régions distinctes; Le Paradis, réservé aux familles des corpos, rassemblant toutes les ressources vitales et récréatives, le Purgatoire, où vivent des employés non essentiels et des prisonniers dans les bonnes grâces du conseil d'administration, et l'Enfer, l'essentiel des infrastructures, où s'entassent bien trop de condamnés à l'oubli, se battant pour les quelques miettes, au sens propre comme au figuré, que celles et ceux du Paradis leur donne. Découpage simple, marquant les esprits et façonnant les attitudes.


Plus en détail, qu'en est-il de la situation lunaire? Pour MoonCol, la station Murassa reste la plus fonctionnelle, et malgré un réacteur à fusion vieillissant, elle abrite une population de 13 429 habitants, soit 10% de trop par rapport à sa capacité maximale. 208 cadres corporatistes, des gardes et leurs familles vivent au Paradis, dans tout le confort possible en cette époque post-apocalyptique. Le MESH n'est plus qu'un lointain souvenir, et celles et ceux qui insistaient pour un retour sur Terre sont tous descendu en Enfer. Le conseil d'administration de Murassa est efficace, à l'écoute des besoins de sa population, une partie des ressources alimentaires est même allouée aux habitants de l'Enfer. De l'extérieur par contre, les dômes semblent plutôt indiquer une installation militaire, avec leur épais blindage remplaçant les fragiles et esthétiques dentelles de fibroplast. Pas moins de trois cercles de sentinelles robotisées lourdement armées veillent sur la zone de mare nectaris, et le conseil envisage même d'allouer scaphandres et rovers à quelques patrouilles de condamnés, bien entendu équipés de dispositifs de traçage agrémentés d'explosifs. Le spatioport est un dôme isolé, automatisé et protégé par des sentinelles robots. Il renferme trois navettes légères faisant le lien avec les colonies orbitales. Désormais anciennes, elles représentent une somme conséquente de technologie, que MoonCol défendra avec violence en sacrifiant des vies. Celles de détenus, bien entendu. Deux des huit dômes secondaires sont toujours en travaux de pressurisation, et comme deux autres parfaitement fonctionnels, deviendront des serres hydroponiques. Environnements hermétiques et occupés par des équipes de botanistes orbitaux, les Serres restent sources de la principale monnaie d'échange de la corporation. Un programme éducatif a été mis en place afin que les enfants nés en Enfer et au Purgatoire soient élevés autour du programme hydroponique, cela avec le bourrage de crâne habituel du système corporatiste. A terme, le conseil espère disposer d'une génération d'ouvriers et d'ouvrières spécialisés, dociles et productifs, comme au bon vieux temps. 


La station Dessala, plus petite, est également structurée sur trois niveaux dont seul le plus haut respecte un tant soi peu les publicités anciennes de MoonCol. Sa population est de 5 329 habitants, soit un excès de 35%. Oui, c'est beaucoup. Le conseil de Dessala à la lourde tâche de faire tourner plusieurs chaînes d'assemblage permettant de fournir des éléments technologiques et militaires, cela grâce à de performantes unités géantes robotisées. Pour tout dire, il arrive que la population de l'Enfer soit oubliée pour de longues périodes. Avec ses trois centaines de corpos, la station offre une certaine opulence à celles et ceux de son Paradis, mais engendre également de violentes révoltes, impitoyablement matées par une garde exclusivement robotique. 
Dessala dispose également de laboratoires de recherche sur la cybernétique, dont les équipes ponctionnent régulièrement des cobayes qui se voient récompensés par une installation au Purgatoire. Aucun d'entre eux n'a cependant le temps de profiter des joies de trois repas quotidiens bien longtemps, le taux de mortalité étant de 99%. Quelles cyber-recherches impliquent un tel carnage? Penserez-vous. Eh bien durant la guerre contre les Onze, des projets nanotech furent dérobés sur des stations lunaires rivales, et depuis lors, des équipes insuffisamment qualifiées dans le domaine cherchent à créer des colonies nanoactives, afin de remplacer efficacement des membres, organes, et rendre les cadres de MoonCol immortels. Cela ne fonctionne pas vraiment. 
Située au beau milieu de mare vaporum, la station Dessala est essentiellement enterrée dans le substrat lunaire, avec peu de dômes visibles et un spatioport dévasté par une explosion nucléaire, il y a de cela bien longtemps. Sa grille de défense compte d'énormes sentinelles armées de rampes magnétiques, mais surtout plusieurs essaims de drones lunaires, semblables à des araignées dotées de gatling et s'enterrant dans le sol. Malgré leur peu d'efficacité en matière de nanotechnologie, les équipes scientifiques de Dessala bénéficient d'un important savoir-faire sur d'autres domaines, et maintiennent ainsi à plein rendement le réacteur de la station ainsi que l'ensemble des supports vitaux. 

Les trois autres stations fondées par MoonCol et perdues bien avant le Point final sont en ruines, leurs dômes ont pour la plupart brûlés, et quelques explosions nucléaires ont achevées de rendre les lieux inhabitables pour quelques générations. La corporation estime cependant que bon nombre de niveaux enterrés, ainsi que quelques dépôts isolés, peuvent être récupérés, ou au pire phagocytés afin de renforcer les structures toujours opérationnelles. Des expéditions robotisées ont été envoyées, mais de trop fortes radiations semblent affecter les plus résistantes unités. Évidemment, le conseil d'administration envisage d'envoyer des groupes de détenus, bien moins coûteux que des machines, reste à sélectionner des éléments à peu près fiables et compétents pour fournir des rapports techniques. 

MoonCol, à son heure de gloire, disposait d'importantes infrastructures sur Terre; Site de lancement nord-américain, plateformes dans et sous l'océan Pacifique, armée privée, ainsi qu'une petite station orbitale. Plus rien de tout cela ne subsiste et les ressources de cette petite corporation sont ainsi concentrées sur la Lune. Quelque part, cette situation lui aura valu de se voir grandement épargnée par le Point final, mais son isolement depuis dix ans inquiète les membres du conseil d'administration, qui voient la situation dégénérer de plus en plus fréquemment au sein des enfers. Deux pistes sont explorées afin d'apaiser la situation; La reconquête des anciens sites, à grands frais mais permettant potentiellement de répartir la population carcérale. Mais également l'exploration des structures abandonnées par les Onze, faiblement peuplées mais bien protégées par un réseau de défense performant. La collaboration avec les habitats en orbite pourrait hâter cette opération sensible, mais ces derniers pourraient également décider de s'emparer pour eux-mêmes des précieuses ressources technologiques laissées par les keratsu sur l'astre lunaire.


Un cadre idyllique : Les plateformes pacifiennes

C'est beau hein? Dommage, ça n'existe plus.
En 2078, les UN mobilisèrent un budget afin de promouvoir un gros chantier en plein milieu de l'océan pacifique. Le but était double; Obéir docilement à Plexitech, grosse keratsu de l'époque, qui voulait décrocher de juteux contrats, et aussi sauver les très nombreux réfugiés climatiques du coin. Plexitech fit les choses en grand, et après avoir encaissé quelques dizaines de milliards, ouvrit ses plateformes flambant neuves aux malheureux migrants. Oh bien entendu, la finalité de l'affaire était de disposer d'une importante main-d’œuvre reconnaissante, mais tout de même, la keratsu avait offert un havre, alors que les États limitrophes n'avaient pour leur part pas fait grand chose. 
2089, le Point final et le retour des infrastructures MESH à l'état de projet avorté. Plexitech ne peut plus monitorer la sécurité de ses plateformes, rappelle ses cadres du pacifique et laisse les communautés locales en auto-gestion. Un peu salauds jusqu'à la fin, les kobun en charge de la logistique du petit Dragon emportent avec eux tous les moyens de transport ainsi que les gros générateurs à fusion. S'ensuit du chaos, de la violence, et des escarmouches plutôt sanglantes entre les quelques punks jusqu'alors cantonnés dans les bas-fonds des plateformes. 
Un tsunami et trois tempêtes plus tard, deux des huit plateformes pacifiennes sont englouties dans les profondeurs azurées. Les lignes d'approvisionnement depuis la terre ferme peinent à se mettre en place, et les ambitions de quelques punks empêchent la survie du plus grand nombre. Il faut attendre 2094 et une première attaque de pirates chinois pour qu'un groupe contestataire émerge et prenne le pouvoir. 
Les nāʻehiku ahi ahi - les sept esprits du feu - sont pour moitié des techniciens de Plexitech, en charge de la maintenance des machines, et pour le reste des représentants des communautés les plus importantes de réfugiés. Les belles paroles ne suffisant pas face aux seigneurs de guerre régnant sur les plateformes, ils utilisent les bonnes volontés - et quelques gentils punks - afin de former une force tactique en mesure de neutraliser les tyrans et repousser les flottilles de pirates. Bien entendu, quand des gars avec des implants de combat sont impliqués, les actions du genre black op sont à oublier, mais hormis quelques carnages vite oubliés, les plateformes pacifiennes louent les nāʻehiku ahi ahi qui se partagent alors la gouvernance des structures. 
Incapables de compléter les ressources technologiques nécessaires à la maintenance d'un écosystème fermé de type arcologie, ce sont les très anciennes traditions insulaires qui sont ramenées à la vie, avec le développement de la pêche, l'utilisation d'éoliennes et d'hydroliennes, ainsi que la transformation de nombreux niveaux en jardins. En quelques années, les plateformes pacifiennes forment véritablement une communauté soudée et en plein développement, attirant malheureusement l'attention de nombreux individus pas nets.

Érigées sur les fondations des atolls submergés du Tuvalu, les plateformes pacificiennes élaborées par Plexitech bénéficièrent d'un financement UN dû fait que son programme initial et officiel devait servir de terre d'accueil aux populations locales restantes. Il n'en fut rien, et en profitant de troubles incessants dans l'hémisphère Nord, la keratsu racheta légalement les concessions submergées de la petite nation, pour en faire un camps de travail bien rempli, doublé d'une zone de non-droit. 
Bien que les technologies employées furent rudimentaires, Plexitech fit bien les choses, et espérait pouvoir par la suite implanter des centres de recherche sur de nouveaux alliages. Bien que toute la grosse machinerie fut par la suite rapatriée vers des lieux plus sûrs, les pacifiens purent conserver abondance de machines qu'un petit groupe de techniciens parvint à adapter aux besoins les plus urgents; la désalinisation et le développement d'un réseau de bouées météorologiques. 
Il subsiste six plateformes pacifiennes, ancrées sur les atolls de Tuvalu, et dont les structures ont depuis peu été renforcées par des éléments récupérés de deux autres stations n'ayant pas résisté à Mère-nature. Les communautés voyagent de l'une à l'autre grâce à de petites embarcations à voiles ou à rames, une flottille d'une dizaine de patrouilleurs légers tenant lieu de force d'intervention. Trois héliports sont encore fonctionnels, les autres ayant été reconverti en jardins, ils abritent une douzaine de petits VTOL à faible rayon d'action, assurant une défense rapprochée. De rudes négociations avec des pirates chinois ont permis aux nāʻehiku ahi ahi de se doter de quelques plateformes de missiles et de catapultes asservies à des IA, permettant une défense efficace de la zone. 
La population totale des plateformes pacifiennes s'élève à 68 452 habitants, et avec 38% de ce chiffre composé d'hawaiens et d'hawaiennes, ce fichu oncle Sam impose toujours son modèle du passé. Bon, hormis la langue anglaise qui était déjà en vigueur dans le secteur, la culture métissée des plateformes est plutôt stimulée par la recherche de traditions anciennes, comme les salanga tuvalu, qui définissent des fonctions spécialisées pour chaque groupe.


Les six plateformes pacifiennes en sont encore à un stade de survie incertaine, car malgré les désastres purement humains ayant ramenés l'espèce à un moyen-âge compliqué, les phénomènes climatiques balayant régulièrement le Pacifique sont toujours pour la pomme des réfugiés, perchés sur leurs structures déjà vieillissantes, et isolées du reste du monde. Et si les individus reçoivent nourriture et eau potable, le problème de la surpopulation se fait cruellement sentir. 
Un tiers de l'énergie totale est toujours fournie par des réacteurs à fusion immergés, et si les centrales sous-marines peuvent fournir une alimentation totale, les nāʻehiku ahi ahi souhaitent économiser les précieuses machineries et s'appuyer sur les éoliennes, panneaux solaires et hydroliennes, formant de grands champs ancrées dans les atolls submergés. Bien entendu, le pacifien lambda se passe d'un accès à un réseau MESH, bien qu'une petite infrastructure virtuelle soit maintenue par un groupe de punks enthousiastes, et la plupart des outils informatiques deviennent de lointains souvenirs pour la majorité des gens. Idem pour les implants cybernétiques, qui retrouvent essentiellement un usage médical. L'environnement marin ne favorise de toute manière pas les améliorations cyber, et les ingénieurs en mesure de les réparer se comptent maintenant sur les doigts d'une main. 
De nombreux pirates chinois viennent cependant commercer avec les plateformes pacifiennes, et organisent évidemment un marché noir pour les jeunes punks. Difficile de savoir où ils s'approvisionnent, mais l'on voit régulièrement apparaître des implants adaptés au déplacement sous-marin, certains même plutôt haut de gamme.



Funafuti est la plateforme centrale, celle où se rassemblent les nāʻehiku ahi ahi qui écoutent les doléances de tous, planifient le développement de leur petite nation, et où tout un staff œuvre afin de renforcer des infrastructures fragiles. Funafuti était avant cela le centre administratif de Plexitech pour tout le pacifique, et même si les corpos emportèrent la grande majorité de leurs équipements avancés, la plateforme dispose toujours d'un important centre de communication, avec même des faisceaux capables d'atteindre les bases lunaires - même si ces dernières ne répondent pas - ou encore certains centres majeurs en Europe. Une équipe de vingt ingénieurs maintien actif le centre de communication, aucun n'a dépassé les vingt ans, tous sont les enfants d'ex techniciens corpos, et pour être précis, la moitié sont des grey hats revanchards, limitant leur hacktivisme par respect pour les guides des plateformes pacifiennes. 

Le réseau MESH local, les motu o te rangi ou Îles du Ciel, est un espace virtuel utilitaire, auquel sont liées une dizaine d'IA assistantes en charge de monitorer les supports vitaux des plateformes. Au moins deux backdoors existent, reliant la structure à la Sphère Eurasienne et aux domaines des Dragons. Meela Onomo, une hacktiviste d'origine polynésienne, chapeaute l'ensemble des opérations et sert de liaison avec le conseil des sages. Âgée de seize ans, son tempérament volatile la place souvent en opposition de la politique prudente et isolationniste des plateformes pacifiennes, mais le respect lié aux nāʻehiku ahi ahi limite sa contestation à quelques joutes verbales et du matériel cassé.

Funafuti dispose d'une équipe de sécurité composée de solos vieillissants mais parfaitement entraîné. Désignés sous le nom de Requins volants, ou nga manene rere, ils sont une quinzaine et forment également l'équipe d'intervention la plus mobile de la région. Avec trois VTOL de conception récente, deux vedettes chinoises et un minisub à fusion, leurs missions se focalisent sur la chasse aux pirates et le transport d'équipes de récupération, chargés de piller épaves et stations sous-marines abandonnées. 
Bien qu'ils soient tous sous contrat avec les plateformes pacifiennes, les membres des nga manene rere ont fondé des familles et s'impliquent dans les activités de leur communauté. 
Makele Henoween est le chef du groupe d'intervention, ancien soldat corporatiste en Afrique du Sud, sa consommation d'implants très lourds le fit sombrer plusieurs années dans une cyberpsychose dont il émergea grâce au Docteur Iwata Okumore qui remplaça la majorité de ses équipements par des équivalents nanobio. Makele est depuis plusieurs années une personnalité charismatique et populaire, un modèle que beaucoup de jeunes pacifiens cherchent à suivre.

Nanumea, la seconde plateforme d'importance, est également la plus petite et abrite à peine deux milliers d'individus, pratiquement tous des ingénieurs ou spécialistes des énergies. Comme les autres structures pacifiennes, elle est en mesure d'assurer sa propre subsistance, mais fourni également la majorité de l'énergie à l'ensemble des plateformes, qui peuvent ainsi économiser leurs propres ressources. Un tiers des occupants de Nanumea sont des IA gestionnaires, en charge des centrales à fusion immergées. Elles monitorent également une flotte de drones sous-marins qui assurent la maintenance des nombreuses sous-stations ancrées dans les grands fonds.
Les niveaux les plus élevés sont réservés à de grands ateliers où les techniciens et ingénieurs cherchent constamment l'amélioration des rendements énergétiques. Un petit laboratoire est en outre réservé à la recherche et développement de batteries et sources d'énergie transportables. De nombreux punks des autres plateformes viennent discrètement s'approvisionner ici, autant pour leurs armes que pour les implants ou véhicules. Bien que le conseil des sages tente de réguler ce trafic, les liens de parenté et services rendus par les punks font que des prototypes dangereusement instables continuent à sortir de la Division E - plus communément désignée sous le sobriquet de BoomLab.

Nui, Niulakita et Nukufetau sont des plateformes d'habitations où se concentrent plus de 90% de la population pacifienne, et si les nombreuses communautés des atolls disparus tentent difficilement de cohabiter, la surpopulation reste le problème majeur de ces structures dont les socles sous-marins commencent à se fragiliser. Très semblables à de gigantesques blocs urbains des métroplex continentales, les plateformes ont été récemment repensées en arcologies aux niveaux interconnectés, et où le communautarisme pourrait devenir une force plutôt qu'une source de tension. Depuis deux ans, des améliorations sont notées par tous, même si la vie reste compliquée. Les dernières bandes, jadis puissantes, sont cantonnées dans les niveaux inférieurs et l'ensemble des trafics de substances nocives atteignent des degrés tolérables.
Les nāʻehiku ahi ahi ont prit soins d'isoler les casernements de leurs forces de sécurité, qui disposent ainsi du contrôle des héliports et des zones portuaires, avec des accès hautement sécurisés. Un centre de commandement permet de contrôler un réseau de tourelles défensives, et une rumeur persistante veut qu'un système de contrôle des foules datant de l'ère Plexitech soit toujours entretenu. Les armureries de ces trois plateformes sont volontairement réduites à des armes anti-émeutes, mais tout le monde sait bien qu'en cas de menace, des IA stratégiques sont éveillées et peuvent ramener des caches d'armes mobiles immergées. 
Le nombre de punks et de trouble-fêtes tend à diminuer à bord des stations de Nui et Nukufetau, où les jardins communautaires ont été rapidement mis en place. Niulakita par contre reste à la traîne, et beaucoup de trafiquants ont migré dans ses structures afin d'exploiter encore un peu la misère humaine. Il ne fait aucun doute que très prochainement, cette plateforme endommagée sera sacrifiée d'une manière ou d'une autre. 

Nanumaga est une plateforme ancrée sur le socle de l'atoll du même nom, elle abrite ce qu'il subsiste de la communauté originelle tuvalu, ainsi que de nombreux migrants australiens et britanniques. Mise à l'écart depuis le départ de Plexitech, elle rassemble dans ses structures le plus grand nombre de punks, solos et fixer. Souvent considérée comme une société de pirates et de hors-la-loi, elle n'en reste pas moins rattachée aux plateformes pacifiennes. Savants fous et techies azimutés sont installés là, dans des laboratoires mal sécurisés produisant invariablement des catastrophes. Une équipe de sécurité aux effectifs changeant tente de maintenir un semblant d'autorité, mais la règle à bord semble plutôt être celle du plus fort.
Étonnamment, le joyeux foutoir de Nanumaga ne déborde que très rarement sur les autres plateformes, qui paient en nourriture et pièces techniques la spécialité des habitants de la station; L'information. Les deux tiers de ces derniers sont en effet de grands voyageurs et disposent d'un incroyable réseau de contacts, certains se trouvant même hors-monde. Bien entendu, chacun agit d'abord dans ses propres intérêts, mais l'ensemble des données collectées est toutefois injecté dans les motu o te rangi, nourrissant des IA prospectivistes servant également de conseillères aux sages. 
En cas de menace sur les plateformes, les habitants de Nanumaga forment également une milice particulièrement efficace, bien que très indisciplinée et souvent violente à l'extrême. Les nāʻehiku ahi ahi emploient ces concitoyens pour envoyer des messages rouge sang aux forces continentales, mais se méfient du prochain chaos généralisé que pourront susciter les habitants de Nanumaga.

2099 - Point de situation global


A l'aube du XXIIème siècle, la société humaine a quelque peu régressée vers ce bon vieux modèle capitaliste qu'elle s'apprêtait pourtant bien à oublier. Les plus puissantes keratsu ne sont plus depuis dix ans, mais de nombreuses rivales s'empressent de combler le vide et bien que les outils de contrôle de masse soient toujours grandement endommagés, la plupart des jeunes Dragons oublient de gouverner avec le gant de velours, pour ne conserver que le gant de fer...

Mais que s'est-il donc passé pour amener l'Humanité dans une situation plus sombre encore que celle des précédentes décades? Eh bien c'est tout bête : La Guerre. Mais pas le gentil massacre localisé pour des enjeux économiques, non. La Cyberguerre, la vraie. Le 16 juillet 2089, les tensions entre un front brièvement unifié des Onze Dragons, les plus puissantes keratsu mondiales, et les hacktivistes du Feedback, un mouvement libertaire global, deviennent intenables. Nul ne sait avec précision ce qui déclenche le Point final, mais le réseau orbital MESH, qui maintien la Grille planétaire ainsi que la majorité des réseaux énergétiques, est soudainement hacké. Dix-huit unités spatiales de chacune 87000 tonnes sont dirigées vers les principales megaplex mondiales, où sont regroupés les sièges des Onze. La Cyberguerre du Point final dure dix-huit secondes, fauche deux milliards d'âmes, élimine la majorité des cadres des Onze et ramène pour quelques années l'ensemble de la société humaine à l'âge de pierre - Des tonnes de munitions en plus - beau boulot du Feedback. Bien entendu, les rumeurs vont bon train parmi les survivants; Sont-ce bien les hactivistes qui jusqu'alors étaient si gentils avec les opprimés? Ce qui subsistait du Conseil des Nations Neutres n'avait-il pas le contrôle du réseau MESH? Ne parlons pas des toutes jeunes colonies lunaires, qui pour le coup ont les coudées franches.

Quoiqu'il en soit, nous voici dix ans après le Point final

Le niveau des affaires n'est pas au top, mais une multitude de petites corporations tentent de recoller les morceaux de l'ancien monde, sans toutefois parvenir à des alliances durables pour régner à nouveau sur le monde. De nombreuses communautés se sont pour leur part organisées et se sont généralement retranchées derrière des murs plutôt hauts, les hordes de nomades sillonnant les continents et les océans en pillant les nombreuses cités en ruines, mais parfois également en cherchant à faire du troc. De vieilles nations ont su profiter de la perte de contrôle des keratsu pour asseoir leur autorité, mais la tendance globale reste toutefois les regroupements en petites communautés, disséminées et repliées sur elles-mêmes. Bienvenue dans le nouvel âge sombre! 

 ça fait tout de même de belles cartes postales pour les punks... sauf qu'il n'y a plus de service postal.

Et le cyberpunk moyen dans tout ça? Eh bien le porteur de bras chromé plein de gadgets à toujours la classe, mais avec les poussières radioactives et les morsures des cannibales qu'il peut croiser durant son périple éternel, le-dit bras ne fonctionne plus très bien. Le Rockerboy n'a plus guère de stades à remplir et le Medic doit apprendre à se passer de sa villa de luxe pour se contenter d'une boîte de conserve rouillée en paiement. Le Media peut toujours écrire ses mémoires sur une vieille tablette fonctionnant parfois, le Fixer et le Solo sont bien les seuls à toujours être surbookés. Oui, l'Apocalypse vient de passer par là et il ne fait pas bon jouer au punk urbain. 

Attention, tout n'est pas sombre et désespéré en 2099! Comme indiqué plus haut, de nombreuses communautés sont revenues aux bonnes vieilles valeurs agraires, et s'il faut passer plusieurs checkpoint avant de voir le potager du coin, les corpos ne sont vraiment pas les bienvenues, et hormis les hordes de pillards, il fait plutôt bon vivre. La réduction drastique des voyages intercontinentaux permet aussi un relatif isolement pour quiconque a eu l'idée brillante de s'établir sur une île, et certaines villes ainsi isolées continuent à prospérer.